28 septembre 2011 - LaCroix.com - Il faut sensibiliser à la dépression de l’enfant
LA CROIX : Le gouvernement a décidé de mettre en lumière les suicides d'enfants. Alors qu'on en dénombre une trentaine chaque année (1), le phénomène vous semble-t-il sous-estimé ?
Christian Flavigny : Il est vrai que la frontière est parfois ténue entre le jeu dangereux et le geste suicidaire. Pour autant, les suicides avant 12 ans restent très rares. Un enfant qui se pend ou se jette par la fenêtre, cela choque terriblement, évidemment.
Mais il ne faut pas alarmer outre mesure sur le phénomène, qui reste marginal.
Je crois qu'il faut surtout sensibiliser à la dépression de l'enfant, dont le suicide n'est que l'une des composantes. Le milieu de la pédopsychiatrie a largement investi ce champ ces dernières années grâce à un grand nombre d'études, à des colloques... Désormais, le phénomène est bien connu. C'est, en revanche, moins le cas chez les pédiatres, qui doivent pourtant être attentifs à ces grandes souffrances d'enfant.
Qu'est-ce qui provoque ces dépressions, voire un suicide ?
Souvent, elles renvoient à un problème d'estime de soi important, l'enfant a l'impression qu'il n'est pas à la hauteur de ce qu'attendent ses parents. Lorsqu'ils sont particulièrement fragiles, en proie au désespoir, certains basculent à l'occasion d'un fait anodin. Je me souviens par exemple d'un garçon de 9 ans qui s'est pendu à la suite d'une mauvaise note.
Mais que signifie la mort à ces âges ?
Chez les enfants, la mort est une absence prolongée. Un jour, l'un d'eux m'a dit une phrase tout à fait révélatrice : « Les cimetières, c'est là que vivent les morts... » On peut dire que vers 7 ans, l'enfant intègre le caractère irréversible de la mort mais pas pour lui-même... Il comprend que son grand-père décédé ne reviendra pas, mais la confusion sur sa propre mort, elle, demeure.
La société actuelle aggrave-t-elle le sentiment de mésestime de soi, qui plonge certains dans la dépression ?
J'ai tendance à le croire, parce que dans certaines sociétés, où la pression est très forte et où les enfants sont confrontés à un idéal difficile à atteindre, les taux de suicides sont plus élevés qu'ailleurs, comme par exemple au Japon. C'est pourquoi, je le répète, il faut être attentif aux dépressions d'enfants, qui sont avec les suicides des adolescents de véritables enjeux de santé publique.
(1) D'après une étude de l'Inserm publiée en septembre 2009, 30 enfants de moins de 15 ans et 522 jeunes de 15 à 24 ans se sont suicidés en 2006.
RECUEILLI PAR MARINE LAMOUREUX
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Saint-Gildas de Rhuys
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